par Olivier Claudon, publiée le 28/09/2013 à 05:00  | 
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patrimoine Ancienne synagogue de Strasbourg La fontaine retrouvée

La synagogue du quai Kléber à Strasbourg, détruite en 1941.  DOC.REMIS

La synagogue du quai Kléber à Strasbourg, détruite en 1941. DOC.REMIS

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L’une des deux fontaines d’ablutions de l’ancienne synagogue de Strasbourg a été retrouvée dans un jardin privé strasbourgeois. C’est l’un des rares vestiges de l’ancien lieu de culte du quai Kléber, incendié en 1940 et détruit en 1941.

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Que reste-t-il de la grande synagogue de Strasbourg détruite pendant la Seconde Guerre mondiale ? Presque rien. Le souvenir d’un bel édifice construit en trois ans selon les plans de Ludwig Levy et inauguré en 1898, des documents d’archives sur un lieu annihilé par la folie des hommes. Quelques rares photos montrent un bâtiment de style néoroman germanique pouvant accueillir près de 1 700 personnes et surmonté d’un dôme octogonal qui culminait à 54 mètres.

Jusqu’à peu, les vestiges se résumaient à deux pierres ; l’une, une petite colonne de porphyre, volée en 2003 alors qu’elle ornait la stèle commémorative, à proximité du quai Kléber à Strasbourg où s’élevait l’édifice. L’autre, un ornement sculpté, exposé sous verre dans les locaux du consistoire israélite, rue Hirschler.

Mais pas de traces des vitraux dont la grande rosace, du grand orgue Roethinger de 1925, des objets du culte, des encorbellements, des pierres sculptées ou taillées. Rien. Ou presque rien. Car l’une des deux fontaines d’ablutions a été retrouvée et identifiée.

C’est un appel téléphonique qui a alerté le consistoire, peu avant Pâques (Pessa’h) de cette année. Une dame habitant la banlieue ouest de Strasbourg prévient qu’elle a dans son jardin une fontaine et elle affirme que celle-ci provient de la synagogue du quai Kléber. Elle veut refaire son jardin et la fontaine est devenue encombrante.

Le responsable des bâtiments du consistoire Jean-Pierre Levy et l’historien Jean Daltroff se rendent sur place. L’historien est formel : « C’est l’une des deux fontaines qui étaient installées dans le vestibule pour les ablutions rituelles », confirme-t-il en produisant une photo parue dans une revue d’architecture berlinoise de 1899 qui consacre alors un article à « la nouvelle synagogue de Strasbourg ».

« Après 70 ans, c’est quand même un retour de l’histoire étonnant et passionnant »

Il s’agit tout du moins de la partie supérieure de la fontaine, avec sa vasque et ses motifs sculptés, des poissons et des éléments floraux. Elle mesure 1,60 m de hauteur et la vasque présente un diamètre d’un mètre. Elle est sculptée dans du grès blanc. La partie inférieure est manquante.

La fontaine est désormais en pièces détachées et attend une restauration évaluée à 30 000 euros comprenant la reconstitution de la vasque inférieure. Le consistoire lance d’ailleurs un appel aux dons. « Après 70 ans, c’est quand même un retour de l’histoire étonnant et passionnant », commente Jean-Pierre Lévy qui souhaite installer cette fontaine dans le hall d’accueil du consistoire, rue Hirschler, à proximité de la synagogue de la rue de la Paix. Le projet prévoit également de la remettre sous eau.

Mais cette découverte pose plus de questions qu’elle n’amène de réponses. Comment et pourquoi cette fontaine a-t-elle été extraite des décombres pour ensuite finir comme objet décoratif dans un jardin privé ? D’autant que les propriétaires avaient connaissance de son origine. Des personnes se sont donc servies sur le chantier. D’autres vestiges dorment-ils à travers la ville ? Certains d’entre eux ont-ils été récupérés pour servir de matériaux de construction pour d’autres bâtiments, privés ou publics ? Car de la synagogue, il ne restait rien sur place au lendemain de la guerre.

Selon Jean Daltroff, elle a été incendiée dans la nuit du 30 septembre au 1er octobre 1940 par des Hitlerjugend venus du pays de Bade et de jeunes Alsaciens. L’incendie a endommagé l’intérieur et le toit.

La synagogue sera ensuite démontée pierre par pierre, méthodiquement l’année suivante. Des photos en témoignent. Aujourd’hui, sur le site s’élèvent les immeubles de la place des Halles, construits bien plus tard.

D’autres éléments de la synagogue sommeillent peut-être, à Strasbourg ou ailleurs, témoins muets d’un temps agité et criminel. Jean-Pierre Lévy espère bien voir réapparaître d’autres pièces.

La synagogue du quai Kléber Strasbourg (1898-1941), Jean Daltroff. ID l’Édition.

par Olivier Claudon, publiée le 28/09/2013 à 05:00

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